C'est un grand plaisir pour moi d'être ici à Paris pour une discussion aussi importante, dans la perspective de la troisième conférence des Nations unies sur l'océan qui se tiendra à Nice en juin prochain et sera coorganisée par la France et le Costa Rica. Je tiens à remercier tout particulièrement le président Macron pour son engagement résolu en faveur de la santé et de la gouvernance des océans, suivant une trajectoire cohérente que l'Union européenne suit également depuis le premier jour. Je souhaite également remercier la Fundação Oceano Azul d'avoir organisé cet événement, démontrant le rôle fondamental de la société civile, de la science et de la coopération transnationale pour aborder un sujet de la plus haute importance. Il y a plus d'un siècle, Jules Verne écrivait, dans "Vingt mille lieues sous les mers" : "La mer est tout!". Pourtant nous, êtres humains, en bons animaux terrestres, choisissons depuis longtemps d'ignorer cette vérité. Nous avons même appelé notre planète "la Terre", alors que ce sont en fait les océans qui couvrent la majeure partie de sa surface, façonnent son climat et permettent à la plupart des formes de vie d'y exister. Le moment est venu de changer de cap. Nous ne pouvons plus tourner le dos aux océans. Parce que les océans sont, avant tout, un bien commun de l’humanité. Ils captent 90 % de l'excédent de chaleur généré par les activités humaines. Ils abritent 80 % de la biodiversité mondiale.Ils produisent 50 % de l'oxygène que nous respirons. Ils absorbent 25 % de nos émissions de dioxyde de carbone. En ce qui concerne le commerce et l'économie, 90 % des marchandises dans le monde sont transportées par voie maritime, et 99 % de nos transferts de données et de nos communications transitent par des câbles sous-marins. Nous devons donc protéger les océans et les mettre en avant en tant que biens mondiaux. L'Europe est née de la mer, a tissé des liens à travers elle et se montrera unie pour la protéger. Il y a dix jours seulement, animés à juste titre d'un sentiment d'urgence, les 27 dirigeants de l'Union européenne ont abordé ce sujet pour la première fois au Conseil européen, avec le secrétaire général des Nations unies, António Guterres. Et pour la première fois, les dirigeants européens sont parvenus à des conclusions très ambitieuses sur l'océan. Premièrement, les conclusions du Conseil européen reconnaissent la triple crise planétaire que constituent le changement climatique, la pollution et la perte de biodiversité. Le déclin de la santé des océans et le changement climatique rendent notre population et notre économie de plus en plus vulnérables à leurs effets. Pour faire face à ces effets, l'Union européenne est à l'avant-garde en matière de protection de la biodiversité tout en capitalisant sur ses vastes ressources marines. Afin de contribuer à parvenir à sa neutralité climatique d'ici à 2050, y compris un objectif zéro-émission dans le transport maritime, qui créera des nouvelles opportunités d’emplois dans les domaines des technologies vertes et réduira la dépendance à l'égard des combustibles fossiles. L'action pour le climat doit comprendre une action en faveur des océans, ce qui est pour nous une priorité. D’autres se sont fixé comme priorité d’aller sur la Lune ou sur Mars. L’Europe, elle, doit considérer l’Océan comme une cause et une mission pour 2050. Deuxièmement, un océan en bonne santé est essentiel à un avenir durable, sûr et compétitif pour l'Union européenne. La sécurité et la prospérité de l'Europe dépendent d'une approche stratégique et globale en ce qui concerne les océans. C'est la raison pour laquelle le Conseil européen s'est félicité, dans ses conclusions, de l'intention de la Commission européenne et du Commissaire Kadis, qui est ici avec nous, de présenter le mois prochain le pacte européen pour les océans, qui prévoit une approche intégrée en matière de gouvernance, de protection et de durabilité économique des océans. Nous disposons de la plus grande zone économique exclusive au monde, y compris les territoires d'outre-mer et les régions ultrapériphériques, qui abritent 80 % de la biodiversité marine de l'Europe. La sécurité économique, la sécurité énergétique et la sécurité alimentaire de l'Union dépendent toutes des océans. Au total, 40 % des Européens vivent dans des régions côtières, qui génèrent environ 40 % du PIB de l'Union européenne. L'économie bleue emploie 3,6 millions de personnes dans l'Union européenne, dans des secteurs tels que la pèche, le tourisme, les activités portuaires, la construction et la réparation navales, l'énergie océanique et le transport maritime. Les océans jouent également un rôle central dans la production d'énergie, dans le développement des parcs éoliens en mer et de la récupération de l'énergie des marées et des vagues. 75 % de notre commerce extérieur et 40 % de notre commerce intérieur sont maritimes. Notre marché intérieur est le deuxième marché mondial des produits de la pêche et de l'aquaculture en termes de commerce et le troisième en termes de consommation. La sécurité et la sûreté des océans sont indispensables pour préserver nos intérêts en mer, y compris la liberté de navigation et l'approvisionnement en matériaux essentiels. La protection de nos activités économiques, de nos citoyens et de nos infrastructures doit être un composant essentiel de notre approche stratégique et globale en matière d’océans. Troisièmement, l'Union européenne s'est fermement engagée à faire progresser la diplomatie des océans, animée par un sentiment d'urgence, un souci de cohérence et un esprit d'ambition. Nous sommes convenus de protéger 30 % de nos terres, de nos eaux et de nos mers d'ici à 2030 dans le contexte du cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal. Nous avons joué un rôle décisif dans la conclusion du traité sur la haute mer.Il est temps à présent de procéder à sa ratification et à sa mise en œuvre. Dans ses conclusions, le Conseil européen a appelé à une action et une ambition accrues au niveau mondial, et notamment à accélérer la ratification du traité sur la haute mer. L'Union européenne avance dans la bonne direction. Mais il n'y a pas lieu de relâcher nos efforts. Nous devons agir plus rapidement et faire preuve d'ambition. Nous devons découvrir, préserver et mettre en valeur. Et nous devons promouvoir une approche basée sur la science au niveau mondial également. Les défis peuvent sembler vastes, aussi vastes que l'océan lui-même. Mais notre capacité à coopérer et notre détermination à faire face aux problèmes mondiaux doivent l'être tout autant. Vous pouvez compter sur l'Union européenne en tant que partenaire fiable et prévisible. Le monde a besoin de l'engagement européen, et l'Europe doit se rapprocher de ses partenaires. Elle doit dialoguer avec les institutions multilatérales pour relever nos défis communs. Dialoguer avec un large réseau de partenaires afin d'éviter une confrontation entre blocs. Reconnaître que le nord et le sud sont tous deux pluriels. Adopter une approche scientifique, seul moyen de soutenir nos évaluations, nos décisions et nos actions. Prendre des mesures en faveur des océans, en appelant d'urgence à des solutions climatiques et géopolitiques. Ne soyons pas la génération qui a fermé les yeux. Soyons celle qui a choisi d'agir. J'espère vous voir toutes et tous à Nice. Je vous remercie. [English translation available soon] |